Une fois n’est pas coutume, mais au vu du nombre grandissant réclamant une véritable instance mondiale de décision, cela pourrait bien arriver. En effet, après la publication d’un article par plus de 32 chercheurs, c’est au tour des professeurs-chercheurs en droit d’appeler à un rassemblement mais en réglementant les efforts visant à lutter contre le changement climatique.
Avec des décideurs et dirigeants politiques de plus en plus incapables de lutter contre le changement climatique mondial, un nombre croissant de scientifiques envisagent l’utilisation de la manipulation ‘manuelle’ de l’environnement dans l’objectif de ralentir le réchauffement qui causerait des dommages irréversibles à la planète et aux populations humaines.
Mais à l’Université de l’Iowa, un professeur de droit estime que les conséquences juridiques de ce type de géo-ingénierie devraient d’abord être mûrement réfléchi à l’avance et qu’une structure de gouvernance mondiale se doit d’être mise en place dès maintenant pour superviser ces efforts.
« La géo-ingénierie est une préoccupation mondiale qui aura des répercussions climatiques et météorologiques dans tous les pays, et il est pratiquement inévitable que certains groupes de personnes seront lésés dans le processus », a expliqué Jon Carlson, professeur de droit à l’UI College of Law. « La communauté internationale doit agir maintenant pour prendre en charge cette activité afin de s’assurer qu’elle est étudiée et déployée avec l’attention de la protection des droits et des intérêts de tout le monde sur la planète ».
Carlson est un expert en droit environnemental et en droit international. Il pense que la géo-ingénierie est inévitable et sera susceptible de se faire plus tôt plutôt que plus tard. Ainsi, le professeur a considéré de manière cartésienne la question dans un nouveau document, publié dans le numéro actuel de la revue Transnational Law and Contemporary Problems (Loi Transnationale et problèmes contemporains), ayant pour titre : « Reining in Phaethon’s Chariot: Principles for the Governance of Geoengineering » (Retenir le Char de Phaéton : principes de gouvernance pour la géoingénierie). Son co-auteur, Adam D.K. Abelkop, diplômé en droit à l’UI, a maintenant intégré le programme de doctorat à l’École de l’Université d’Indiana de la Santé Publique et de l’Environnement.
Carlson a affirmé que le concept de géo-ingénierie remonte au moins au 19ème siècle, lorsque les scientifiques ont proposé d’ensemencer des nuages pour augmenter les précipitations. Aujourd’hui, les scientifiques ont une longue liste d’idées qui pourraient être utilisées pour ralentir l’impact du réchauffement de la planète tandis que d’autres méthodes sont développées pour effectivement limiter les dégâts. Certaines idées sont simples et localement ciblées, telles que la plantation de nouvelles forêts à absorption de dioxyde de carbone, ou peindre les toits et les surfaces pavées en blanc pour réduire la pénétration de la chaleur provenant du soleil.
D’autres sont plus complexes et controversées, le refroidissement manuel des océans pour que l’eau piège plus facilement et rapidement le carbone ; la construction de boucliers et miroirs spatiaux pour refléter la chaleur solaire de la planète, ou l’injection de produits chimiques – tels que le sulfure d’hydrogène ou le dioxyde de soufre – dans la haute atmosphère, créant un bouclier aérosol qui réduit la quantité de chaleur solaire atteignant la surface de la terre.
Mais M. Carlson a estimé que la géo-ingénierie est livrée avec des implications juridiques internationales évidentes, car aucun pays ne peut mettre en œuvre son propre plan de géo-ingénierie sans provoquer des changements météorologiques ou climatiques dans d’autres pays. Il y a aussi des conséquences qui seraient imprévues. En effet, tandis que de nombreux concepts de géo-ingénierie ont prouvé leur fonctionnement en laboratoire, personne ne sait ce qui se passera quand cela sera réellement mis en pratique. Par exemple, Carlson a dit que le refroidissement manuel de l’océan peut être vu comme une idée globalement bonne, mais quel impact cela aura-t-il sur les agriculteurs en Inde dont les cultures dépendent des moussons tropicales induites par la chaleur ?
Pour répondre à ces questions, Carlson demande instamment la création d’un organisme international régissant, de façon tout à fait distincte de toute organisation existante, l’approbation ou le rejet des plans de géo-ingénierie, en prenant en considération l’intérêt supérieur des personnes et des pays à travers le monde.
Il a expliqué que tout régime juridique impliquant des activités de géo-ingénierie devrait exiger qu’ils soient annoncés publiquement dans la phase de planification, et tous les pays se doivent d’être et se tenir informés afin qu’ils aient une voix dans les délibérations.
En tant que modèle pour son organe de surveillance, Carlson suggère le Fonds Monétaire International (FMI). Comme le FMI, son organisation donnerait à tous les pays une place dans les discussions, mais les décisions seraient prises par un groupe relativement restreint d’administrateurs, dont chacune a un vote pondéré qui serait basé sur la production de leur pays de gaz à effet de serre. Autrement dit, plus les pays produisant des gaz à effet de serre dépenseront de l’argent dans cette lutte contre le changement climatique mondial, plus il aura de voix.
L’organisme proposé par Carlson superviserait un fonds d’indemnisation pour aider les personnes et les pays qui sont lésés par d’autres dans l’approbation des activités de géo-ingénierie, ou par des effets invisibles de ces activités.
Citations de EurekAlert, via Université de Iowa
Crédit image À-la-Une : CC davedehetre / Flickr
Seconde image : Image d’illustration de l’essai pour la revue de l’Université de l’Institut du Minnesota pour l’Environment – © Jamais Cascio
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