Des coins et des recoins. Les structures complexes internes composant le cerveau humain enfin révélés avec des détails infinitésimaux sans précédent. En effet, il y a quelques jours une équipe a réalisé une carte en trois dimensions appelée BigBrain (grand cerveau) la plus détaillé et précise jamais construite. Elle devrait conduire à un instantané extrêmement plus précis du fonctionnement des différentes régions du cerveau et de la manière dont elles interagissent.
Jusqu’à présent, les emplacements précis des neurones qui composent le circuit de notre cerveau ont été difficiles à cartographier, en grande partie parce que la surface du cerveau humain est couverte de plis et de replis. La technique la plus courante est de “trancher” le cerveau, minuscule morceaux par minuscule morceaux, exposant des images en deux dimensions, de sorte qu’il est souvent difficile de savoir où et comment les cellules au sein de ces plis sont organisés dans l’espace tridimensionnel.
Pour concevoir cette nouvelle carte, Katrin Amunts, du Centre de recherche de Jülich en Allemagne, et ses collègues se sont servis du cerveau d’une femme âgée de 65 ans, et l’ont découpé en tranches de cire de plus de 7400 sections, dont chacune avec une épaisseur de 20 micromètres – soit un cinquième de la largeur d’un cheveu d’être humain – et en ont tiré des images numériques (possédant également à une résolution de 20 micromètres).
Rassembler ces images dans un modèle complet en 3D n’était pas une tâche facile. Il a tout de même fallu 1000 heures sur un supercalculateur (ordinateur d’une très grande puissance). Mais parce que la résolution des images était très élevée, l’ordinateur a pu déterminer la forme 3D de chaque pli correctement, même si la tranche avait été coupée avec un angle différent.
Tour de force
« C’est un tour de force qui n’avait jamais été réalisé auparavant », a expliqué Arthur Toga de l’Université de Californie, à Los Angeles. La résolution du modèle est 50 fois plus élevé que celui des cartes précédentes, lui permettant de faire ressortir les corps cellulaires individuellement – mais pas toutes les projections qui relient une cellule à l’autre. Toga a ajouté que cela comblait une lacune entre les images à basse résolution des scans du cerveau de personnes malades et les images microscopiques des connexions entre les cellules nerveuses.
Le groupe d’Amunts prévoit d’afficher en ligne Bigbrain dans l’objectif que d’autres chercheurs puissent l’utiliser comme modèle et l’intégrer dans d’autres résultats. Par exemple, en superposant les cartes de l’activité des gènes, il peut être possible de travailler sur les cellules qui exercent des fonctions particulières.
Cela peut aussi servir de référence utile pour l’initiative “BRAIN” défendue par le président américain Barack Obama, visant à cartographier l’ensemble de l’activité du cerveau. « Vous ne pouvez pas cartographier une fonction sauf si vous pouvez le rapporter à sa structure », a souligné Toga.
Van Wedeen de l’Université de Harvard, qui a fait valoir que le cerveau est structurée en un réseau 3D étendu, espère que la carte va révéler des tendances et des structures inattendues. « Il y a une énorme quantité de chose que nous ne connaissons toujours pas », a-t-il exprimé.
Entraînement cérébrale
En faisant des cartes similaires d’autres cerveaux, il devrait également être possible d’étudier la variabilité naturelle à l’intérieur de ces structures, et enfin rechercher des anomalies liées à des maladies neurologiques spécifiques. Amunts est déjà en course dans la reconstruction d’un second cerveau – qui devrait se faire plus rapidement comme son groupe est maintenant plus expérimenté.
Pendant ce temps, Jacopo Annese, de l’Université de Californie à San Diego, est en train de construire des cartes en se basant sur un nombre de tranches plus faibles et plus épaisses, mais dont chaque image atteindront une résolution de seulement 0,5 micromètres. Cela devrait révéler les connexions entre les cellules individuelles.
Le groupe d’Annese, appelé l’Observatoire du Cerveau, a récemment tranché le cerveau d’une personne qui avait souffert d’épilepsie et qui avait perdu sa mémoire à long terme après la chirurgie. L’équipe est en train de construire des modèles numériques de sections de cerveau de 60 autres personnes, y compris certains qui avaient vécu avec divers de troubles psychiatriques.
L’étude a été publiée dans le magazine Science, sous la référence DOI: 10.1126/science.123538.
Citations de New Scientist
Crédit image À-la-Une : Un microtome est utilisé pour couper un cerveau conservé dans de la paraffine sur des milliers de lamelles épaisses de seulement 20 micromètres – © Amunts, Ziles, Evans et al
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